Valerian et la Cité des Mille Planètes
Desplat Pays
Audacieux mais loupé, le dernier-né de Luc Besson ne manquait pourtant pas d’arguments. Tourné en grande partie dans la Cinecittà de Saint-Denis, « le film le plus cher du cinéma français » ambitionnait de relancer l’industrie locale, porté par la farouche volonté de son réalisateur. De ce point de vue, pari réussi puisque la bataille a permis, outre l’assouplissement et la généralisation du crédit d’impôt, l’enregistrement de la bande originale au studio 104 de la maison de la Radio, suite à d’âpres négociations.
Une centaine de musiciens de l’Orchestre National, quarante choristes, voilà une éternité que la France n’avait pas accueilli un enregistrement de cette taille pour une musique de film. Concurrencé par le faible coût des orchestres de l’Est et la réputation de ceux de Londres, LSO en tête, Paris a, ces dernières années, délaissé la production à grande échelle, la fermeture du mythique studio Davout en étant le plus frais témoignage. Difficile de prédire si Valerian ouvrira une brèche dans la rigide institution de Radio France mais pour Alexandre Desplat, c’est une première réussie.
Fraîcheur et variété
Hors contexte, la musique de Valerian était déjà, en soi, une curiosité, le compositeur succédant, à la surprise générale, au fidèle Eric Serra, la nouvelle tombant quelques jours seulement après l’annonce de son retrait de Rogue One. Dans cette spatiale partition, preuve est faite que Desplat a toute sa place parmi la liste des héritiers à la couronne. Celle de Williams donc (ce n’est d’ailleurs pas un hasard si l’on retrouve à l’orchestration l’unique Conrad Pope). Valerian in Trouble, Bus Attack, Spaceship Chase, Fishing for Butterflies, il y a assurément quelque chose du grand space opera de notre enfance, avec ces cors pétaradants et une écriture aussi virevoltante que maitrisée, nous amenant d’un marché virtuel à une course poursuite au cœur d’Alpha, gargantuesque station-planète.
La réussite du score ne réside pas seulement ici. C’est surtout dans la fraicheur et la variété que le musicien remporte la mise, s’engouffrant avec plaisir dans l’univers foisonnant de Christin et Mézière. S’il ne peut sauver, à lui seul, les lourdeurs de nombreuses séquences, il les accompagne avec talent (Pearls on Mul, le souper du roi) et les sublime même parfois, incorporant une touche originale d’électronique. C’est d’ailleurs le cas sur deux des meilleures pistes, Medusa et Pearl’s Power. L’effet Serra, sans aucun doute.
Cela ne l’empêche pas d’affirmer son style, intimiste (la très jolie ouverture de Big Market) ou plus expansif comme c’est le cas sur l’excellent The City of 1000 Planets, cousin évident d’Obliviate, l’ouverture d’Harry Potter et les reliques de la mort. Innovante et intelligente, la bande originale de Valerian méritait un bien meilleur film pour s’épanouir totalement, mais aussi une bien meilleure édition numérique (optez pour le digipack), étrangement bordélique et donc insupportable à l’écoute. Une manière pour Besson de relancer aussi l’industrie du disque…
Valerian et la cité des 1000 planètes, bande originale d’Alexandre Desplat, à retrouver en physique (oubliez le numérique!) chez Idol.